Otto: Bonjour Edwin*. Merci d’avoir accepté de partager votre expérience d’auto-entrepreneur depuis maintenant plus de 2 ans.
Avec plaisir.
Avec un peu plus de 2 ans de recul, quel regard portez-vous sur le dispositif auto-entrepreneur ?
Globalement, j’ai avis très positif. Ceci dit, mon vécu est très différent selon qu’il s’agit d’une activité d’appoint ou de l’activité principale. Je peux d’autant mieux comparer les deux, puisque j’ai tout d’abord été salarié en même temps qu’AE puis AE indépendant.
Ainsi, quand j’ai eu mon numéro de SIREN début janvier 2009, j’étais salarié. Et je l’ai été jusqu’à la fin 2009. Ensuite, j’ai poursuivi mon activité professionnelle comme AE indépendant.
Commençons par le début : comment se passe la vie d’un AE qui est salarié par ailleurs ?
En tant que salarié, l’intérêt du dispositif AE est évident. Cela permet de légaliser des petites activités complémentaires : prestations de formation, dépannage informatique, ventes récurrentes sur ebay...
Outre légaliser l’activité, il y a un vrai plaisir à « jouer le micro-entrepreneur » : on a un vrai statut qui valide cette activité comme étant une activité économique.
Les charges sont très raisonnables, car très inférieures à celles du statut d’indépendant qui impose des cotisations plancher.
D’ailleurs, si on rappelle qu’on ne paie rien si on ne fait pas de chiffre d’affaire, on ne peut que conseiller à tout salarié de s’enregistrer comme auto-entrepreneur sans plus attendre.
Pourquoi conseiller de s'enregistrer comme auto-entrepreneur sans attendre ?
Deux raisons. L’antériorité de l’activité contribue à donner de la crédibilité : un entrepreneur est plus crédible si son activité existe depuis 6 mois que s’il s’est enregistré la veille... même s’il s’agit de sa première facture.
La seconde raison concerne le cas du salarié qui se retrouve chômeur : s’il était enregistré en activité non salariée (y compris AE) avant de s’inscrire au pôle emploi, le chômeur peut continuer son activité non salariée indépendamment de ses indemnité chômage (dans certaines limites). Alors que s’il s’enregistre comme AE après être identifié comme demandeur d’emploi, il basculera obligatoirement dans la catégorie « chômeur créateur d’entreprise ».
Et alors, quel intérêt de ne pas rentrer dans cette catégorie ?
En théorie ce n’est pas gênant, puisque on a la possibilité de continuer de toucher les indemnités « assedic » en complément des revenus de l’activité indépendante (AE). En pratique, si on veut retrouver un travail salarié, on ne sera plus vraiment prioritaire vis-à-vis du pôle emploi, qui considère que votre projet professionnel est bouclé. On ne reçoit donc plus d’offres d’emploi, et vous n’aurez plus de rendez-vous avec le conseiller emploi. En bref, on ne se pose pas toutes ces questions si on s’est enregistré comme AE avant de quitter ou perdre son emploi.
Mais le fait de son entreprise (ou AE) après être inscrit au pôle emploi donne accès à l’ACCRE ?
Bien vu. L’ACCRE est intéressant pour les entrepreneurs indépendants et en particulier pour les AE, puisque cela annule presque toutes les charges la première année et les réduits les 2 années suivantes. C’est donc un point à prendre en compte, surtout si l’on pense faire beaucoup de chiffre d’affaires dès le début (et donc payer "beaucoup" de charges).
Vous disiez être passé AE à plein temps en début d’année dernière. Quel regard portez-vous sur ce dispositif pour un AE à part en entière ?
Si on part du principe que l’on en vit et donc que l’on facture un chiffre d’affaire conséquent (c'est-à-dire proche des plafonds), on constate que l’on a aussi des charges importantes. Par exemple les frais de déplacement (train ou voiture), les achats d’équipements et fournitures (ordinateur, logiciel), les frais commerciaux (publicité, restaurant) et bien sûr les assurances (responsabilité civile pro, prévoyance).
En AE, pour toutes ces charges, on ne peut ni récupérer la TVA, ni déduire les charges des revenus. Bien sûr, il y a un abattement forfaitaire, mais plus on travaille, plus on risque de dépasser le forfait d’abattement.
Au final, j’ai le sentiment que le régime d’AE dans une activité principale est bancal et non durable. En même temps, c’est son objet : être un statut de transition. Et à l’usage, je me rends compte que le simple fait de produire des factures « exemptées de TVA » ne fait pas très sérieux car les clients savent que l’on a un chiffre d’affaire limité, et on passe pour des « bricoleurs ».
Quels sont donc vos projets pour cette troisième année d’activité d’entrepreneur ?
Ma préoccupation pour la fin d'année 2010 a été de finir cette deuxième année sans dépasser les plafonds d’encaissements. Car il s’agit bien de plafonds d’encaissement et non de chiffre d’affaires, car on déclare les montants encaissés et non les montants facturés. Peu de clients refusent de payer plus tard ;-)
Pour la suite, puisque j’approche déjà les plafonds du régime AE, je vais devoir choisir un autre régime. Actuellement, je penche pour le régime réel, notamment le nouveau régime d’EIRL.
Merci Edwin pour ce témoignage, et rendez-vous dans un an pour faire le bilan de l’EIRL !
Encore une fois, avec plaisir :-)
Note: * Le prénom a été modifié à la demande de l'AE.