Il me parait tellement évident que l'on peut "faire du gras" avec les régimes à cotisations forfaitaires comme le régime micro-entreprise ou le régime d'auto-entrepreneur, que je n'en ai jamais parlé ici.
Pourtant, mes nombreux échanges avec des (futurs) auto-entrepreneur lors du dernier
salon des entrepreneurs m'ont fait réaliser que tous n'ont pas conscience
des bénéfices (ou pertes) potentielles qu'offres le statut d'auto-entrepreneur (ou le régime micro-entreprise).
Je vais donc tâcher d'expliquer comment on peut gagner plus (et évider de "perdre") avec ces régimes. C'est simple, l'astuce réside dans l'aspect "forfaitaire" des cotisations.
L'effet levier des charges forfaitaires
Vous le savez (sinon, lisez mon billet qui détaille les
charges forfaitaires de l'auto-entrepreneur), c'est le chiffre d'affaires (autrement dit, les sommes facturées et encaissées) qui sert à déterminer le montant de vos cotisations sociales, puis des revenus apportés à votre foyer fiscal pour le calcul des impôts sur le revenu annuel.
Au moment où j'écris ces lignes (juillet 2009), les cotisations sont
Pour le
régime Auto-entrepreneur, directement tirées du Chiffre d'Affaires:
- 12% de votre chiffre d'affaires pour des activités de commerce (achat-revente)
- 21,3% de votre CA pour des activités de service (libéral non réglementé inclu)
Pour les Travailleurs Non Salariés (TNS) au
régime micro-entreprise, les cotisations sociales représentent
environ 40% du chiffre d'affaire
après un abattement forfaitaire de:
- 71 % du CA pour les activités d'achat/revente, et les activités de fourniture de logement,
- 50 % du CA pour les autres activités relevant des BIC (commerce et services),
- 34 % du CA pour les BNC (professions libérales)
Par exemple, pour une activité d'achat-revente, les cotisations sociales représentent environ 40% de 29% du CA, soit environ 11,6% du CA. On voit que c'est bien équivalent aux 12% du régime auto-entrepreneur.
Peu importe les revenus, seul le CA compte
C'est ce qu'il faut retenir de ces règles barbares: pour vos cotisations, le vrai "reste à vivre" (ou votre résultat net) n'est absolument pas pris en compte. En effet, pour simplifier le régime, une proportion moyenne de frais a été prise en compte. Et donc, si vous dépensez moins que cette moyenne (que l'on peut évaluer à 71% du CA pour une activité d'achat-revente grâce aux informations du
régime micro),
c'est tout bénéfice, net d'impots, de charges sociales, et en toute légalité.
Oui, vous lisez bien: il est possible de ne pas payer d'impots, de charges sociales en toute légalité. Il suffit de dépenser moins que l'abattement forfaitaire. Ainsi, si pour votre activité de conseil, vous avez dépensé 1500€ et "gagné" 15000€ sur l'année, vous profitez de 3600€ net d'impots et de charges offerts par le régime forfaitaire.
On refait le calcul ensemble? Le
régime micro nous apprend qu'un abattement forfaitaire de 34% est pratiqué pour une prestation intellectuelle. Vous avez facturé (et encaissé) 15000€ sur l'année, l'administration considère que vous avez pu dépenser 5100€ (34% de 15000€) pour cela. Vous n'allez donc payer des charges et impôts que sur 9900€. Sur les 5100€ restant, vous n'en avez dépensé que 1500€, il reste donc 3600€ qui ne seront ni imposés, ni "chargés", en toute légalité!
De l'importance de surveiller ses dépenses
Vous comprenez maintenant pourquoi je
recommande de comptabiliser ses dépenses, même si ce n'est pas obligatoire: c'est le meilleur moyen de voir si l'on fait des bénéfices net d'impots et de charges, ou si, au contraire, on paie des impots sur de l'argent qui ne va pas dans notre poche.
C'est l'effet pervers des abattements forfaitaires: si on n'y prend pas garde, on peut dépenser plus que la moyenne, et donc payer des charges forfaitaires sur des sommes que l'on a déjà dépensé.
Pas clair? Prenons un exemple concret: J'ai un petit commerce de cartes de voeux. Je les achètes 1€TTC, les revends 2€, soit une marge de 100% (ou encore: elles me coûtent 50% de mon CA). Comme je dépense moins que l'abattement forfaitaire (71%, ou encore 29% de "reste à vivre"), je peux penser que je fais 21% de "gras". A la fin de l'année, j'en ai vendu pour 20000€, qui m'ont donc couté 10000€ (j'ai de la chance, mon fournisseur me reprend les invendus, je n'ai donc pas de stock). Mais j'ai également payé 400€ de loyer et 200€ de charges diverses (EDF, internet, assurance...) par mois, soit 5000€ sur l'année.
Bilan? J'en ai pour 15000€ de dépenses (10000€+5000€), soit 78% de mon CA (ou encore 22% de "reste à vivre"). Je vais payer des charges (et des impôts) sur 29% de "reste à vivre", alors que j'en ai réalité que 22%. Les 7% de dépenses au-delà de l'abattement, soit 1400€, ne sont déjà plus dans mon porte-monnaie, et pourtant, je suis taxé dessus.
Ces deux exemples, bien que tirés du
régime de la micro-entreprise, s'appliquent pleinement au
statut de l'autoentrepreneur: le principe des charges forfaitaires a été conservé, et les taux appliqués tiennent compte de "charges moyennes" pour votre type d'activité (achat-revente ou service).
Optimiser son auto-entreprise (ou micro-entreprise)
Je pense que vous comprenez mieux pourquoi
je dis tous le temps qu'un auto-entrepreneur doit sans cesses
veiller à limiter ses dépenses, et à
viser des dépenses les plus proportionnelles possibles au chiffre d'affaires.
Si vous vous débrouillez bien,
vous pouvez doubler votre "reste à vivre", et ce en toute légalité. Si vous n'êtes pas vigilant,
vous pouvez "manger la grenouille", alors que vous pensez faire une marge confortable.
D'ailleurs, ça m'interesse de savoir ce que vous faites:
- Faisiez-vous un suivi de vos dépenses? Allez-vous le faire?
- Faites-vous "du gras" ou au contraire "mangez-vous la grenouille"?
Otto.